Talking to … Mélodie Mousset

Quel est le propos d’EMPATHY CREATURES ?  

EMPATHY CREATURES traite de la responsabilité collective et de l’acte de prendre soin. 

L’installation immersive combine VR et simulation en temps réel. Elle met en scène un oiseau virtuel animé par l’IA, qui réagit à l’atmosphère émotionnelle environnante. Cet oiseau reflète notre capacité, ou notre incapacité, à prendre soin de nous-mêmes et des autres. Les participant·e·s interagissent avec lui dans un environnement scénographique qui évoque à la fois le burn-out en entreprise et la résilience émotionnelle. Je le décris volontiers comme une sorte de Tamagotchi collectif. 

Dans une expérience partagée, on observe ce petit oiseau dans le jardin magique d’un bâtiment brutaliste. En assistant à son quotidien stressant, nous prenons conscience, ensemble, de notre responsabilité pour son bien-être. Dans une expérience VR plus intime, chacun·e peut interagir avec l’oiseau à travers des rituels de relaxation et d’ancrage. EMPATHY CREATURES est une expérience sociale de l’empathie : nous ne sommes pas seul·e·s, nous œuvrons ensemble à trouver un équilibre entre l’individu et la société. 

Qu’est-ce qui vous a amenée à explorer ce sujet ?  

J’ai développé ce projet lors de ma résidence artistique au Mobiliar Lab for Analytics en Suisse. Je me suis inspirée de leurs recherches sur le stress numérique au travail et de la manière dont les technologies émergentes, telles que l’IA et la VR, pourraient contribuer à aborder ces enjeux de société. 

J’ai imaginé une créature virtuelle si sensible à notre stress collectif qu’elle agit comme un capteur vivant ou un miroir de notre épuisement émotionnel en tant que société. L’apparence et le comportement de l’oiseau évoluent en fonction de son état émotionnel, et l’expérience en VR nous permet de suivre la même évolution. 

Depuis, l’oiseau est même devenu la mascotte des scientifiques du Lab. 

Qu’est-ce qui rend la XR si captivante à vos yeux ? 

Pour moi, ce médium, c’est presque comme travailler directement avec la matière humaine : la perception, l’émotion, le cerveau, et la croyance en ce qui est réel ou non. 

J’ai toujours été fascinée par l’espace liminaire entre science et croyance magique. La réalité virtuelle, avec sa dimension performative et transformative, est un médium extraordinaire pour cela. Telle que je l’utilise, la VR ne montre pas un enregistrement figé. Ce que j’aime, c’est cette dimension immersive où l’on ne sait jamais vraiment ce qui se passe, presque comme dans un documentaire. Je fixe des paramètres, j’ouvre de nouvelles frontières et je laisse les autres vivre l’expérience. J’aime me décrire comme une « sorcière digitale » pratiquant une magie sympathique. 

Que représente le fait d’être artiste VR en Suisse ?  

Il existe en Suisse des projets remarquables, mais les créateurs dans le domaine immersif font encore face à de nombreux défis. Des initiatives existent pour renforcer la visibilité et accompagner les créateurs, notamment de la part du GIFF, du Pôle numérique, de Virtual Switzerland et du soutien XR de SWISS FILMS. Mais les médias immersifs restent difficiles à définir et nécessitent des coûts de production élevés. À la croisée de la narration, de la performance, de l’art et du jeu vidéo, ils constituent un défi pour les institutions. 

Je suis reconnaissante que mon projet ait reçu du soutien, mais ce n’était pas facile. Venise représente une véritable opportunité de lancer des projets suisses sur la scène internationale ! 

EMPATHY CREATURES a été produit par la Collection d’art de la Mobilière Coopérative avec le soutien du Pôle de création numérique. 
La présentation à Venise a bénéficié du soutien de SWISS FILMS, de l’Istituto Svizzero à Rome, de la Commune du Chenit, de Pro Helvetia ainsi que des cantons de Vaud et de Zurich.