Rétrospective SWISS FILMS 2022
L'année cinématographique suisse marquée par de grandes envolées dans les festivals et un beau coup de projecteur sur les films d'animation
23.12.2022
La forte présence dans des festivals de premier rang ainsi que de nombreux prix prestigieux témoignent du succès des films suisses sur la scène internationale en 2022. Des premiers longs métrages prometteurs et des deuxièmes ou troisièmes œuvres d'exception y ont grandement contribué. Par ailleurs, le Festival d'Annecy a réservé au cinéma d'animation suisse un accueil spectaculaire et un projet non conventionnel est venu poser de nouveaux jalons...
Première de LA LIGNE de Ursula Meier à la Berlinale. ©Ali Ghandtschi
Cette année encore, les nombreux succès en festivals témoignent de l'excellent niveau du cinéma helvétique. De Berlin à Tallinn, les films suisses étaient présents dans les plus grands festivals de cinéma internationaux. Plusieurs talents de la réalisation ont attiré l'attention avec leurs premiers longs métrages de fiction. C'est le cas par exemple de Carmen Jaquier et de son film FOUDRE (Close Up Films, Flavia Zanon), un drame initiatique à caractère historique présenté lors du Toronto International Film Festival, et programmé juste après dans les festivals de San Sebastian, Zurich, Busan et Thessalonique, pour n'en citer que quelques-uns. Montré en première mondiale lors de la Quinzaine des réalisateurs à Cannes, le film d'Elena López Rieras EL AGUA (Alina film, Eugenia Mumenthaler et David Epiney) figurait lui aussi au programme de Toronto et de San Sebastian. Il a été nominé deux fois au prix Goya de l'Académie espagnole.
Avec sa satire queer DE NOCHE LOS GATOS SON PARDOS (Andrea Film), Valentin Merz ose une forme narrative d'un tout autre genre. Ce film a célébré sa première mondiale en compétition internationale à Locarno, où il a obtenu une mention spéciale dans le cadre du prix du meilleur premier film. Au festival Visions du Réel de Nyon, Tizian Büchi a remporté le Grand Prix avec sa fable documentaire L'ÎLOT (Alva Film Production, Britta Rindelaub), qui a ensuite continué son périple festivalier à Karlovy Vary, Bordeaux et São Paulo. Invité par le Black Nights Film Festival de Tallinn (PÖFF) à venir y présenter son film THE LAND WITHIN (Alva Film Production, Thomas Reichlin), Fisnik Maxville est reparti avec le «Best First Feature Award».
L'année a été marquée par l'émergence de nouveaux talents aussi devant la caméra, à l'instar des actrices suisses Souheila Yacoub et Kayije Kagame. Toutes deux ont été suggérées par le Comité Révélations de l'Académie des Césars comme candidates potentielles au célèbre prix français pour 2023. Elles ont été également présentées par la European Film Promotion comme «European Shooting Stars» lors de la Berlinale (en 2022 pour Souheila Yacoub, en 2023 pour Kayije Kagame).
Deuxièmes et troisièmes films à succès
Plusieurs cinéastes ont été remarqués sur la scène internationale cette année avec leurs deuxièmes ou troisièmes longs métrages. Ainsi, le réalisateur Jan Gassmann a fêté la première de son troisième film de fiction 99 MOONS (Zodiac Pictures) à Cannes, dans le cadre de la programmation ACID. Ce drame relationnel a poursuivi sa carrière festivalière à Edimbourg, São Paulo, Bordeaux et Zurich. À Cannes également, le producteur Stefan Eichenberger (Contrast Film) a participé, sur recommandation de SWISS FILMS, au «Producers on the Move», le programme pour jeunes talents de la European Film Promotion. GIRL GANG (Christian Frei Filmproduktion), le documentaire de Susanne Regina Meures consacré aux influenceurs et influenceuses, a fêté sa première mondiale en compétition officielle du CPH:DOX à Copenhague avant d'être nominé pour le Prix du cinéma européen. Le deuxième long métrage documentaire d'Eva Vitija, LOVING HIGHSMITH (Ensemble Film, Franziska Sonder, Maurizius Staerkle Drux) a quant à lui été projeté dans plusieurs festivals et cinémas en Amérique du Nord et en Europe. Sa réalisatrice était également présente lors du festival de film de Sydney, dans le cadre du programme «Europe! Voices Of Women in Film».
Le film historique UNRUEH (Seeland Filmproduktion; Linda Vogel, Michela Pini) de Cyril Schäublin a fait une impressionnante carrière festivalière cette année, avec pas moins de trois participations à des festivals de première catégorie (Berlin, Toronto et San Sebastian). Il a remporté de multiples distinctions, notamment le prix de la meilleure réalisation dans la section «Encounters» de la Berlinale. À Berlin également, Michael Koch a fêté la première de son drame alpin DRII WINTER (hugofilm features; Christof Neracher) en compétition officielle, pour lequel il a obtenu une mention spéciale du jury. Fort de nombreuses distinctions glanées aux quatre coins du monde et d'une riche carrière festivalière, DRII WINTER a été choisi pour représenter la Suisse dans la course à l'Oscar en 2023.
Succès festivaliers pour des cinéastes à la solide réputation
Parmi les cinéastes dont la réputation n'est plus à faire, la productrice tessinoise Michela Pini a enregistré à nouveau un beau palmarès international cette année. Pas moins de trois œuvres qu'elle a coproduites ont été présentées lors du festival de cinéma de Toronto: UNRUEH, déjà mentionné plus haut, ainsi que deux coproductions minoritaires avec le Canada, UNTIL BRANCHES BEND de Sophie Jarvis (Schweizer Koproduktion Cinédokké, Olga Lamontanara) et SOMETHING YOU SAID LAST NIGHT de Luis De Filippi (Schweizer Koproduktion Cinédokké, Cloud Fog Haze Pictures avec Michael Graf, Lido Pictures avec Rhea Plangg), qui sont tous deux des premiers longs métrages de fiction.
Ursula Meier et Lionel Baier, avec leur maison de production Bandita Films (Max Karli, Pauline Gygax), ont eux-aussi à nouveau brillé dans des festivals internationaux de renom. Ursula Meier a ainsi figuré pour la deuxième fois en compétition officielle de la Berlinale avec son drame familial LA LIGNE. Quant au film de Lionel Baier LA DÉRIVE DES CONTINENTS (AU SUD) ̶ une satire sur le thème de la politique migratoire européenne ̶ , il a été montré pour la première fois dans le cadre de la Quinzaine des réalisateurs à Cannes.
Annecy a fait la part belle au film d'animation suisse
En juin, le Festival international du film d'animation d'Annecy et son marché du film (Mifa) ont déroulé le tapis rouge pour les cinéastes helvétiques. Le fameux festival a organisé la rétrospective la plus importante jamais consacrée au cinéma d'animation suisse, un événement qui a vu le jour sur l'initiative de SWISS FILMS en collaboration avec de nombreux partenaires issus de l'industrie cinématographique. Pas moins de 15 films figuraient dans les sections compétitives du programme officiel du festival, parmi lesquels THE RECORD de Jonathan Laskar et IDODO d'Ursula Ulmi. En tout 14 programmations spéciales ont été consacrées au film d'animation suisse des 100 dernières années. Le documentaire d'animation INTERDIT AUX CHIENS ET AUX ITALIENS (Schweizer Koproduktion Nadasdy Film, Zoltán Horváth) a été montré dans la section compétitive consacrée aux longs métrages. Cette œuvre du réalisateur Alain Ughetto a remporté le Prix du jury à Annecy avant d'être sacrée Meilleur long métrage d'animation lors du Prix du cinéma européen en décembre. À l'occasion du marché du film d'Annecy, la Suisse a montré quatre œuvres immersives dans le cadre du projet SWISSXRLAND monté en collaboration avec le GIFF, le Geneva International Film Festival. Pour répondre aux besoins de ce nouveau format de production, SWISS FILMS a lancé en 2022 une initiative pilote intitulée «Swiss Immersion». L'objectif de cette mesure de soutien est de renforcer la présence des œuvres immersives suisses au niveau international.
La Suisse très présente dans les festivals internationaux
En plus de la vaste rétrospective consacrée aux films d'animation suisses à Annecy, et de la forte présence - déjà mentionnée plus haut - d'œuvres suisses dans des festivals de premier ordre tels que Berlin, Cannes, Toronto et San Sebastian, la Suisse était également bien représentée lors du International Documentary Film Festival Amsterdam, avec pas moins de huit films au programme. Montré en compétition internationale, PARADIS d'Alexander Abaturov (coproduction suisse, Intermezzo Films, Luc Peter et Katja Monla) a remporté le prix de la meilleure photographie. Le court métrage de Matthias Joulaud et Lucien Roux (Akka Films, ECAL/HEAD), RAMBOY, a décroché quant à lui le prix du meilleur documentaire pour la jeunesse. La section «Luminous» a montré les premiers longs métrages de Hanna Nobis (First Hand Films, Esther van Messel), POLISH PRAYERS, et d'Elena Avdija (Bande à part Films, Agnieszka Ramu), CASCADEUSES. Ce dernier film, qui dresse le portrait de trois cascadeuses, a été présenté pour la première fois lors du Zurich Film Festival, où il a remporté l'Œil d'or dans la compétition «Focus».
En matière de carrière festivalière, ce sont sans hésiter les réalisatrices Anna Lena Spring et Lara Perren qui remportent la palme cette année avec leur court métrage d'animation SAUNA (HSLU). En effet, depuis sa première en 2021, ce film a été montré dans plus de 20 festivals de renom aux quatre coins du globe. Le court métrage d'animation ONLY A CHILD de Simone Giampaolo (Amka Films) a été nominé aux BAFTA pour les Children & Young People Awards. Le succès de Maria Brendle est également à souligner, avec son court métrage ALA KACHUU – TAKE AND RUN (Filmgerberei) qui figurait parmi les cinq nominés pour la 94e édition des Academy Awards, dans la catégorie «Live Action Short Film». Le court métrage DER MOLCHKONGRESS de Matthias Sahli et Immanuel Esser (ZHdK) a lui aussi fait un début remarqué: après avoir décroché plusieurs prix aux festivals de Locarno et Sitges, il a été invité au fameux Sundance Film Festival qui se tiendra en janvier 2023.
Une Heidi hors du commun et des salles de cinéma en stagnation
Un projet original a fait parler de lui cette année, il s'agit de MAD HEIDI, une réinterprétation audacieuse du grand classique suisse. Réalisé par le duo Johannes Hartmann et Sandro Klopfstein (Swissploitation Films) et produit par Valentin Greutert (A Film Company), ce film d'exploitation est peu conventionnel tant au niveau du contenu que du financement ou de sa diffusion. La majeure partie de son budget a été réunie grâce un financement participatif sur la blockchain. Deux semaines après sa sortie en salles, MAD HEIDI était déjà disponible en streaming dans le monde entier, ses créateurs considérant la projection dans les cinémas européens avant tout comme une mesure de marketing.
Une inspiration pour l'avenir? Les années de vaches grasses sont sans doute terminées pour les cinémas car le nombre de spectateurs peine à se redresser après la pandémie de Covid-19. Heureusement, il existe quelques exceptions réjouissantes: DE RÄUBER HOTZENPLOTZ de Michael Krummenacher et DIE GOLDENEN JAHRE de Barbara Kulcsar, tous deux produits par Lukas Hobi et Reto Schaerli de Zodiac Pictures, ont attiré plus de 300 000 spectateurs·trices en Suisse et en Allemagne (état 11.12.2022).
L'année 2022 a aussi été synonyme de deux pertes considérables pour le cinéma suisse. Le monde a dû faire ses adieux à Jean-Luc Godard et à Alain Tanner, décédés tous deux à seulement quelques jours d'intervalle, à l'âge de 91 et 92 ans. Ces deux géants de la réalisation et leurs œuvres iconiques ont marqué durablement le monde du cinéma et les cinéastes suisses.
Films
Foudre
El agua
De Noche los Gatos son Pardos
The Land Within
99 Moons
Girl Gang
Loving Highsmith
Unrueh
Drii Winter
La ligne
La dérive des continents (au sud)
Something You Said Last Night
Until Branches Bend
The Record
IDODO
Interdit aux chiens et aux italiens
Ramboy
Der Molchkongress
Polish Prayers
Cascadeuses
Only a Child
Ala Kachuu – Take and Run
Sauna
Mad Heidi
Die goldenen Jahre
De Räuber Hotzenplotz
Last Dance
Semret
Alles über Martin Suter. Ausser die Wahrheit.